Publication Information
Oui, en Yougoslavie, en Rouma
nie,
en Espagne, à Tokyo, partout
Rome-Berlin gagne
reste ceci : la France, en dépit de
son désordre intérieur, représente
de nouveau, aux yeux des peuples,
un idéal — non pas un idéal révo
lutionnaire —
un idéal humain
Malgré ses échecs répétés sur le
plan diplomatique, on recommence
à dire d’une certaine façon et sur
un certain ton : La France
. Ceux
qui naguère se réjouissaient de ses
malheurs, s’inquiètent maintenant
de sa force diminuée.
Derrière les minorités triom
phantes,
il y a les peuples, ces
masses d’ouvriers, de paysans, d’é
tudiants,
de professeurs dont la
vraie pensée est inconnue. Certes,
nous leur donnons trop de raisons
de douter de notre sagesse, mais
c’est pour eux-mêmes qu’ils trem
blent
lorsqu’ils tremblent pour
nous.
Ce serait assez qu’il n’y eût que
le sort de la France engagé, pour
que la partie qui se joue tînt tous
les Français en état d’alerte et
d’éveil ; mais des millions d’hom
mes,
qui ne croient plus à notre sa
gesse,
croient encore à l’idéal hu
main
qui s’incarne en nous. Dans
notre humble sphère, nous en
nous, les écrivains français, et de
puis
cette année surtout.
Lisant ce matin, dans
l’article de Claudel
Berthelot
semblait
bien à de l’orgueil. Cette
prose nourrie de tous les sentiments
et de toutes les pensées que l’amitié
et la foi inspirent à un grand
poète paraissait là, dans ce quoti
dien,
comme un article ordinaire,
courant : nous sommes assez ri
ches,
nous n’y regardons pas de si
près.
Mais la littérature a une valeur
de signe. Elle témoigne de la vie
intérieure d’un peuple. Où en est
la littérature allemande ? la litté
rature
italienne ? Je ne dis pas
qu’elles n’existent plus. Mais vi
vent-elles
comme la nôtre ? Répon
dent-elles,
comme la nôtre, à une
aspiration universelle
En 1937, nous avons perdu sur
tout le front diplomatique. Mais il
y a des gains invisibles, des victoi
res
secrètes dont l’effet n’apparaît
pas d’abord. Et c’est notre gloire
et c’est notre force que les gouver
nements
ne se puissent dresser
contre nous sans atteindre, sans
blesser le cœur même de leurs
peuples.