Publication Information
Des étudiants catholiques sont
venus me demander conseil au su
jet
d’une revue dont le projet est à
l’étude et qui grouperait la plupart
de celles où s’expriment déjà leurs
associations diverses. Je crois loyal
de publier sur les toits ce que je
leur ai dit dans le secret du cabi
netce que vous entendez dans le creux de l’oreille, proclamez-le sur les toits
(
même.
C’est qui me frappe, c’est le con
traste
entre les publications si vi
vantes
que les grands ordres reli
gieux
rédigent directement et
l’atonie de celles qu’ils inspirent
ou surveillent.
intellectuelle, les Études carmélicarmé-
.
tainesLa Vie intellectuelle
: Marc Sangnier, le thomisme et le personnalisme
des revues qui paraissent aujour
d’hui.
On n’en saurait dire autant
de ces recueils sages, appliqués et
timides, rédigés par des enfants
dont on tient le poignet.
Et un autre contraste me frap
pe :
les ressources de tous ordres
dont déborde la jeunesse catholi
que
française, intellectuelle et ou
vrière,
et cette grisaille des bulle
tins
où elle s’exprime.
Je crois donc que la première
condition de vie pour la jeune re
vue
en question serait qu’on fît
confiance à ses rédacteurs ; qu’on
leur reconnût, pour tout ce qui ne
touche pas au dogme, à la disci
pline
et à la morale, le droit de
chercher, et celui même d’être im
prudents,
quitte à discuter avec
eux, et dans la revue même, leurs
opinions. Mais il faudrait, pour
que ce fût possible, que la revue
non pas ses maîtres…
Et c’est ici que je touche au
point délicat qui est aussi, à mes
yeux, le plus important : cette re
vue
ne devrait pas représenter
zone d’influence
ce que je veux dire.
Elle ne devrait être le pion noir
ou blanc d’aucun échiquier. Com
prenez-vous ?
M’entendez-vous ?
Moi, je m’entends.
La direction religieuse devrait
être confiée à un ecclésiastique
choisi par les étudiants eux-mê
mes,
avec l’approbation épisco
pale,
et porter moins sur la revue
que sur ses rédacteurs, moins sur
les textes que sur les âmes.
Psichari
ble
d’écrire sous le regard de la
TrinitéPsichari,
(
qu’une jeune revue catholique de
vrait
être rédigée, mais par des
hommes libres — et non par des
garçons coiffés encore de leur cas
quette
à liséré bleu ou à galon
d’or.
J’exprime ici une opinion per
sonnelle.
Il se peut qu’elle soit té
méraire
et que mes conseils soient
inapplicables. Mais ce dont je suis
certain c’est que nous vivons dans
un dur monde où il n’y a plus de
place pour les enfants en lisière, et
où ce qui devrait distinguer d’un
jeune stalinien et d’un jeune fas
ciste
un jeune catholique, c’est l’at
titude
dégagée, libre, fière de ceux
qui sur toute question posée n’ont
pas à demander la permission de
penser ce qu’ils pensent.