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C’était l’heure du courrier ; d’après le libellé des adresses, j’augurais des approbations ou des injures.
Un jeune homme m’écrivait : ... La justice du général Franco, je l’espère, frappera sans faiblesse et
Impossible d’aller plus avant : de toutes les sortes
aussi sans vaine cruauté les responsables basques, au moins ceux qui n’auront pas fui. J’espère qu’il sera
inexorable pour les prêtres et pour les civils…
de férocités, celle qui naît de la niaiserie est la moins supportable.
Pour reprendre haleine, j’ouvris alors
che
du Vatican auprès du général Franco
24 juin : Le cardinal, secrétaire d’État Eugenio Pacelli
. Ces dernières lignes, d’une charité toute gratuite, expriment ce
de Tolède, représentant officieux du Saint-Siège auprès du gouvernement de Burgos, le chargeant
d’intervenir auprès du général Franco pour que celui-ci apporte la plus grande modération dans les
opérations militaires du secteur de Biscaye, où il se trouve en présence d’une population et d’un clergé
catholiques. Cette initiative n’est pas le résultat de la réunion de la Congrégation des affaires ecclésias
tiques
extraordinaires qui s’est tenue dimanche dernier. Elle a été prise à la suite d’une intervention de
personnalités politiques françaisesPour le peuple basque
,
que S. É. le cardinal Pacelli a dans le cœur pour ses amis de France.
On nous avait dit : Le Pape n’a pas besoin que vous lui dictiez sa conduite…
Nous n’avions pas
eu non plus cette pensée ridicule, mais il n’est pas défendu de prier en vue d’une grâce temporelle. Nous
avions crié vers notre Père, en acceptant d’avance de n’être pas exaucés, visiblement. D’autres se
moquaient : Le Pape fait la sourde oreille…
, écrivait l’
prompte, si pleine de miséricorde ! Nous avions frappé à la porte et elle s’ouvraitDemandez et l’on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous ouvrira.
alors l’émerveillement étonné des hommes de peu de foigens
ou homme(s) de peu de foi
à plusieurs reprises dans l’évangile (surtout celui de Saint Matthieu : voir
Quelle sera l’attitude du vainqueur ? Rien n’a transpiré encore des mesures arrêtées à l’égard des
adversaires, prêtres ou fidèles, tombés entre ses mains. Les manifestes publiés avant la prise de la ville
ne rassurent parce qu’ils se ramènent tous au mot terrible du plus fort, pour qui la résistance est
un crime : Que les bons se rassurent et que les méchants tremblent
Proclamation au peuple français
, 13 juin 1849 : Il est temps que les bons se rassurent et que les méchants tremblent.
Où sont les bons ? Où sont les méchants ? Tous les uns à gauche et tous les autres à droite comme
au dernier jugementnations
: le Fils de l’homme […] placera les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche
(v. 33) — le premier groupe est qualifié de béni
et le second de maudit
.
Et nous ne faisons pas au général Franco l’injure de le croire incapable d’une discrimination éclairée
par la prière. Du moins, les Basques savent-ils aujourd’hui qu’ils ne sont pas traités en fils réprouvés, qu’ils
ont toujours leur place à la table du père de famille et qu’aucun de leurs frères n’a le droit de les en
chasser sous prétexte qu’ils sont responsables de leur malheur. Cette responsabilité, après avoir lu le livre
de Bernoville, je l’admettais en partie au moment où dans
témoignages qui m’arrivent depuis une semaine éclairent le drame basque d’une lumière nouvelle. Et sans
doute, il importe de les discuter, de s’informer. Le jour où nous connaîtrons toute la vérité, nous la
dironsun certain silence lourd qui venait de haut
(L’Inquiétude catholique en France
,