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Le Christ et l’ouvrier. Douze mois plus tard, Mauriac donnera une conférence intitulée, elle aussi,
Le Miracle de la J.O.C.et dont le texte sera reproduit dans
La déchristianisation des masses aux XIXe
siècle est le coup le plus terrible que l’Église
ait subi depuis l’hérésie de Lutherle plus grand malheur qui ait frappé l’Église depuis la réforme de Luther : le divorce entre la religion et la classe ouvrière.
On notera toutefois que la notion très péjorative d’hérésie
dans le texte de 1937 sera remplacée par celle de réforme
un an plus tard.
catholiques s’accordent sur ce point, mais
alors pourquoi ne saluent-ils pas tous d’un
même cœur le miraculeux épanouissement
d’une jeunesse ouvrière chrétiennerendre la société ouvrière christianisante au lieu d’être socialisante
. La JOC réussit à occuper un terrain en partie déserté par les militants de la gauche laïque, celui des jeunes ouvriers des quartiers populaires. Elle comptait environ 45 000 adhérents a la fin des années 1930.
notre prolétariat presque entièrement
marxiste
Nous disons bien :
ouvriers s’avancent à contre-courant : ils di
sent
non aux idéologies triomphantes, non à
leurs intérêts matériels, à leurs passions de
classe, à leurs passions tout court. Ils cèdent
à une préférence de leur cœur, ils ont re
trouvé
la source perdue.
A LourdesA Lourdes
,
pour bien moindres miracles. Il n’est rien
qui devrait aujourd’hui nous étonner davan
tage
que la J.O.C., rien si ce n’est l’indif
férence
que certains des nôtres lui témoi
gnent,
si ce n’est cette méfiance, cette hos
tilité…
L’autre soir à la Mutualité, Malraux, qui
peut-être m’avait reconnu au fond de la salle,
par-dessus les milliers de poings tendus qui
nous séparaient, me posait la questionLe Retour du Milicien
, paru dans Le
clergé espagnol a eu ce peuple entre les
mains… qu’en a-t-il fait ?
Laissant de côté le problème espagnol, je
voudrais répondre à Malraux : Voyez ce qui
se passe chez nous. La renaissance chrétienne
dans la jeunesse ouvrière demeure d’abord, à
nos yeux, un coup surprenant de la Grâce.
Mais le jeune clergé, les jeunes religieux de
France ont magnifiquement coopéré à la
Grâce.
C’est à une certaine bourgeoisie ca
tholique
et à la presse qu’elle sou
tient,
que Malraux pourrait adresser
sa question qui, d’ailleurs, ne reste
rait
pas sans réponse. La formule ma
ladroite
il faut aller au peuple
n’en a pas moins durant touttous
dans l’original,
neuvième
siècle suscité d’admirables
dévouements. Du côté marxiste,
on peut affecter d’ignorer ou de
compter pour rien l’école sociale
catholique et l’enseignement des en
cycliques
pas seulement sauvé l’honneur ca
tholique,
elle n’a pas agi seulement
dans les cœurs et dans les esprits, elle
a collaboré efficacement à toutes les
lois ouvrièrescollaboré
est sans doute trop fort. Aucun catholique social ne fut présent dans les gouvernements de la IIIe République avant la nomination d’Auguste Champetier de Ribes, président du Parti démocrate populaire, à partir de 1929 dans différents Cabinets (Tardieu et Laval). Ces textes ont toutefois créé un climat favorable à une prise de conscience plus aiguë de la condition ouvrière. Ainsi comptait-on à la Chambre des députés un nombre assez important de catholiques sociaux dont la figure de proue était Albert de Mun (1841-1914).
Mais la J.O.C., c’est bien autre
chose. Il ne s’agit plus de jeunes
bourgeois qui vont au peuple : il
s’agit de jeunes ouvriers qui vont au
Christ. Le Christ ne leur est pas ap
porté
du dehors par des représentants
des classes privilégiées
en eux, à côté d’eux, au milieu d’eux,
celui qui ne les avait jamais quittés.
Ils le retrouvent dans ses prêtres,
dont plus d’un sont des camarades
sortis de leurs rangs et qui, avant
d’élever le calice et de rompre l’hos
tie,
ont soulevé le marteau.
Il faut que les catholiques de
France prennent conscience de ce qui
lieu
d’eux :
racle
de Grâce
pas l’oreille à la calomnie : là où vit
le Christ, il n’y a pas de place pour le
matérialisme marxiste. Certes, la
J.O.C. représente au milieu de nous
une exigence de justice sociale que
nous pouvons être tentés parfois de
trouver gênante ou inopportune. Mais
les catholiques ne sont pas libres de
se résigner aux salaires souvent déri
soires
de la jeunesse ouvrière, à la
sous-alimentation des adolescents, au
manque d’hygiène des ateliers, à
l’horreur des taudis.
Au contraire, nous devons leur être
reconnaissants, à nos jocistes, de nous
rendre sensible ce lien qui unit, qui
confond toutes les classes dans un seul
amour. Leur mission auprès de nous
est plus importante que celle que
nous pourrions avoir au milieu d’eux.
Il leur suffit d’exister, d’être ce qu’ils
sont, pour que tel petit prêtre que je
connais et qui lutte durement dans
une banlieue hostile ne perde pas
cœur. Le bien qu’accomplissent les
militants jocistes dépasse les frontiè
res
de leur classe : les privilégiés du
monde ramassent en secret les miettes
qui tombent de la table des pauvres.