Œuvre journalistique de François Mauriac 1937-1938

Pour le peuple basque

Samedi 8 mai 1937
L’Aube

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Pour le peuple basque

La guerre civile espagnole vient de prendre au pays basque
un caractère particulièrement atroce.

Hier, c’était le bombardement aérien de Durango.

Aujourd’hui, par le même procédé, c’est la destruction presque
complète de Guernica, ville sans défense et sanctuaire des traditions
basques.

Des centaines de non-combattants, de femmes et d’enfants ont
péri à Durango, à Guernica et ailleurs.

Bilbao, où se trouvent de très nombreux réfugiés, est menacé
de subir le même sort.

Quelque opinion que l’on ait sur la qualité des partis qui
s’affrontent en Espagne, il est hors de conteste que le peuple
basque est un peuple catholique, que le culte public n’a jamais été
interrompu au pays basque.

Dans ces conditions, c’est aux catholiques, sans distinction de
parti, qu’il appartient d’élever la voix les premiers pour que soit
épargné au monde le massacre impitoyable d’un peuple chrétien.
Rien ne justifie, rien n’excuse des bombardements de villes ou-
vertes comme celui de Guernica.

Nous adressons un appel angoissé à tous les hommes de cœur,
dans tous les pays, pour que cesse immédiatement le massacre de
non-combattants.

ONT SIGNÉ :

François Mauriac, de l’Académie française ;
André Bellivier, Charles du Bos, Stanislas Fumet,
Francisque Gay, Georges Bidault, Hélène Iswolski, Georges
Hoog, Olivier Lacombe, Maurice Lacroix, Jacques Ma-
daule, Gabriel Marcel, Jacques Maritain, Emmanuel
Mounier, Jean de Pange, Domenico Russo, Boris de
Schloezer, Pierre van der Meer de Walcheren, Maurice
Merleau-Ponty, Martin Moré, Claude Bourdet, Claude
Leblond, Paul Vignaux, un groupe de 28 élevés de l’École
normale supérieure.

DE L’ÉTRANGER, ONT ADHÉRÉ :

Élie Beaussart, Luigi Sturzo, V.-M. Crawford, et le groupe
anglais « People and Freedom » .

LES NOUVELLES SIGNATURES SERONT RECUEILLIES PAR
M. PAUL VIGNAUX, 14, RUE QUATREFAGES, PARIS (5e)

Le présent appel est livré à la publicité après que quelques-uns de ses
signataires, présents à Paris — M. Stanislas Fumet, Mme Hélène Iswolski,
MM. Olivier Lacombe, Jacques Madaule, Gabriel Marcel, Jacques Mari-
tain, Pierre Van der Meer de Walckeren [sic] — ont pu entendre sur les faits
de Guernica le témoignage de M. le Chanoine Onaindia y Zuioaga [sic] qui se
trouvait sur les lieux au moment du bombardement.

Réserve faite des conclusions qu’une enquête internationale pourrait
seule établir sur la question de savoir si d’autres éléments ont pris part à
la destruction, il ressort de ce témoignage que Guernica, ville sans
défense, a bien été bombardée sans répit pendant trois heures, et que les
avions poursuivaient à la mitrailleuse les gens qui fuyaient.



Date:
© les héritiers de François Mauriac (pour le texte des articles) et les auteurs (pour les notes)