Œuvre journalistique de François Mauriac 1937-1938

Sur les bombardements de villes ouvertes : Les opinions de MM. Goyau et Mauriac

Dimanche 10 juillet 1938
Le Figaro

Page 7

Sur les bombardements
de villes ouvertes

Les opinions de MM. Goyau
et Mauriac

Sollicité d’exposer son opinion
sur les bombardements de villes
ouvertes, M. Georges Goyau, secré--
taire perpétuel de l’Académie fran--
çaise, a rédigé ce message :

« Lorsque je lis dans les chroniques
que dans la première moitié du
onzième siècle le Concile de Ver--
dun-sur-Doubs, soucieux de proté--
ger les civils contre les violences
de la guerre, défendait qu’on in--
cendiât les maisons, qu’on détrui--
sît les moulins, qu’on assaillît
ceux qui transporteront les pro--
duits de leurs vendanges, et lorsque
je lis dans les journaux du ving--
tième siècle le récit du bombarde--
ment des villes ouvertes, comment
ne pas conclure que le haut moyen
âge, organisateur de la paix de
Dieu et de la trêve de Dieu, était
plus propice que ne l’est notre
époque, dite scientifique, à l’atté--
nuation des maux de la guerre ?
»

De son côté, M. François Mauriac,
de l’Académie française, écrit :

« Devant les crimes de la « « guerre
totale » » l’indifférence monstrueu--
se d’une partie de l’opinion euro--
péenne est une complicité qui sera
peut-être punie de mort.
»

« D’aussi grandes civilisations que
la nôtre ont disparu corps et biens,
à des époques où la science n’était
pas, comme elle l’est aujourd’hui,
au service de la destruction. La nô--
tre périra par manque d’amour.
»



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